Un peu d’histoire sur la Plaine de Versailles

Origine : encourager une logique de développement plutôt que de protection.

Les années 2000 marquent la genèse de l’association

Le territoire de la Plaine de Versailles a plutôt bien résisté à la vague déferlante de l’urbanisation des années 60-90. Nous nous en réjouissons mais ce n’est pas par hasard!

De vastes espaces naturels ont cédé la place à Élysée 1, Élysée 2 et Parly2… heureusement que dans ce dernier cas l’arboretum de Chèvreloup a tenu le rôle de pare-feu, évitant le pire.

Au début des années 2000 afin de protéger la partie Est de la plaine, dans le prolongement immédiat du parc de Versailles et ainsi préserver la perspective royale du château menacée, l’Etat a procédé au classement de 2600 hectares environ. Classement très protecteur mais contraignant pour l’agriculture, toute construction devant passer en commission des sites.

A la même époque, la plus grande partie de la plaine à l’ouest, reste quant à elle sans aucune protection juridique et donc, « vacante » pour l’urbanisation!

Il devient alors évident pour les agriculteurs mais aussi pour les élus et habitants qui vivent et travaillent sur ce site qu’une réflexion sérieuse suivie d’action s’impose si l’on veut conserver la cohérence des paysages agricoles et sauver l’agriculture.

Faisons un petit retour sur l’histoire locale.

Vers la fin des années 1980, Gérard Laureau exploitant agricole précurseur, prit l’initiative de réunir régulièrement au fruitier de la ferme de Gally un groupe de travail d’une dizaine de personnes pour réfléchir dans le contexte de l’époque sur l’avenir de l’agriculture en plaine de Versailles. . Quelques cultivateurs, quelques élus locaux (j’eus la chance d’en faire partie) et quelques habitants s’impliquèrent sérieusement dans cette réflexion. Après quelques séances de travail, Gérard Laureau très opportunément choisit un intervenant pour approfondir et guider le débat.

Henry Ollagnon alors professeur à AgroParisTech, praticien de haut niveau dans le domaine de la gestion du vivant et des stratégies patrimoniales nous apporta un éclairage nouveau. Avec talent il nous initia à ces notions alors méconnues.

Sa collaboration fut décisive pour amener notre groupe de travail à tenter l’aventure de créer une association patrimoniale. En effet, elle fut très forte la prise de conscience que cette plaine est notre héritage commun, que nous avons le devoir de la transmettre à nos enfants aussi belle et vivante que nous l’avons trouvée.

Nous sommes tous concernés : agriculteurs et habitants ou élus. Chacun doit y trouver son compte grâce à une gestion patrimoniale bien mise en œuvre.

Peu à peu se dessinaient les contours de cette association patrimoniale avec ses objectifs et sa stratégie.

Ce fut un temps passionnant qui nécessita la formation d’une association informelle et préparatoire de ce qui deviendrait l’Association Patrimoniale de la Plaine de Versailles et du Plateau des Alluets (APPVPA ), il fallait aussi recruter les personnes bénévoles souhaitant prendre un rôle actif dans cette aventure originale.

Ils furent nombreux et enthousiastes, leur travail dura plus de 3 ans toujours sous la conduite de Gérard Laureau entouré de son groupe de bénévoles de la 1ère heure…

En 2004 naissait l’APPVPA

Début marqué par un deuil, Daniel Jarrot, adjoint au maire de Villepreux, choisi à l’unanimité par ses pairs pour présider notre association patrimoniale décéda brutalement en juillet, nous laissant tous désemparés et attristés.

Ce fut Michel Colin, maire de Noisy le Roi qui accepta avec courage de prendre la barre de cette fragile embarcation qui n’avait ni port ni pécule. L’optimisme de Michel Colin fit des miracles. Il logea l’APPVPA dans un tout petit bureau de la commune sous les combles et au-dessus de la bibliothèque. La culture tient un rôle essentiel dans la plaine de Versailles !

La priorité était bien entendu de rédiger les statuts pour pouvoir gouverner cette association avec 3 collèges : Élus, Agriculteurs, Habitants . La stratégie patrimoniale impliquant la participation de tous les acteurs de la Plaine. Longues discussions suivies d’un vote à l’unanimité. Ces statuts ont évolué au cours des années bien entendu.

Quant aux deniers manquants, c’est grâce à son talent pour la pêche aux subventions que le Président les trouva. De plus, Christian Blanc député de la 3ème circonscription des Yvelines (la nôtre) apporta son concours très précieux

et fut un intermédiaire performant auprès de cabinets d’études qui, intéressés par la modernité de l’association prodiguèrent leurs conseils. L’ambition pour notre territoire était d’en faire un « Pôle d’Excellence »

En 2009 l’APPPVPA remporte un grand succès : elle est lauréate du programme de financement européen LEADER qui permit la réalisation de 60 projets!

La nécessité de rédiger une  » charte paysagère participative de la plaine de Versailles » se fit très vite sentir pour mener à bien, la gestion du vivant et répondre à la demande des agriculteurs. C’est un très long travail, délicat et minutieux. Cette charte paysagère sera adoptée et signée par les 24 maires en fonction en 2013.

Durant toutes ces années le projet de Maison de la Plaine se développe, avec la rénovation de l’ancienne gare de Feucherolles en 2015 qui sera alors mise à disposition de l’association. C’est un lieu patrimonial, au centre de la Plaine qui permet un espace vitrine ouvert à tous avec des produits locaux et de nombreux documents (livres historiques, guide de randonnées, les hébergements…) et une salle de réunion.

Au fil des années, c’est un travail extraordinairement diversifié et exemplaire, qui fut réfléchi et exécuté par les bénévoles des 3 collèges avec la même générosité, le même élan !

Michel Colin a passé le témoin à Patrick Loisel, Maire de Feucherolles en 2012 qui lui-même a passé le flambeau à Vincent Gay, maire d’Herbeville en 2022.

L’aventure continue pour l’APPVPA, la convoitise demeure.

Colette Le Moal

Présidente d’Honneur

UNE INITIATIVE ORIGINALE DE COOPÉRATION ENTRE AGRICULTEURS ET CITADINS POUR GÉRER LA QUALITÉ DU VIVANT

Face au vide créé par la fin du SDAU du val de Gally et par ce classement « sec », Gérard Laureau, président de la SAA et quelques élus dont Colette Le Moal, alors maire de Bailly, lancent une initiative parallèle de réflexion et d’action avec d’autres agriculteurs de la région parisienne.

Ils voient dans ce contexte périurbain menaçant (il n’est pas si loin le temps où la Plaine commençait au Chesnay, sous l’actuel Parly 2 !) une nécessité d’évolution et une opportunité de diversification, en particulier vers la filière cheval.

Ils mettent alors en place une démarche patrimoniale au travers de la méthodologie du Pr Henri Ollagnon d’AGROPARISTECH. Le Conseil régional participe à cette approche et l’étend à 4 territoires d’Île-de-France.

Cette démarche consiste à poser la question des conditions et des moyens d’une coopération entre les agriculteurs et les citadins pour gérer la qualité du Vivant en milieu périurbain. Elle vise à reconnaître aux acteurs présents sur le territoire quel est leur patrimoine commun, afin qu’ils le prennent en charge ensemble, dans une vision dynamique.

Une démarche patrimoniale (90 entretiens individuels et 4 groupes de travail) est réalisée par Vincent Pupin afin de mobiliser les acteurs sur cette question. Cette démarche aboutit à un constat partagé, que la qualité du Vivant n’a pas été prise en charge jusqu’à maintenant sur cet espace, qu’elle repose en grande partie sur l’agriculture, et qu’un lieu de rencontre est nécessaire.

Une association « Agriculteurs et citadins de la Plaine de Versailles » est créée, puis transformée en association patrimoniale en 2004. Celle-ci est étendue à la partie non classée, jusqu’au Plateau des Alluets et la vallée de la Mauldre.

CRÉATION D’UNE ASSOCIATION PATRIMONIALE À 3 COLLÈGES, COMME LIEU DE RENCONTRE, DE DIALOGUE, D’EXPRESSION DE PROPOSITIONS

En 2004, est créée l’Association Patrimoniale de la Plaine de Versailles et du Plateau des Alluets, dont l’objet est :

« Créer un espace de communication pour faire se rencontrer, puis rassembler, les personnes physiques et morales représentatives des différents intérêts locaux, afin de réfléchir, étudier et formuler des propositions visant à l’établissement d’un projet de développement durable, commun aux agriculteurs et aux citadins, sur les territoires de la Plaine de Versailles et du Plateau des Alluets, en faisant toutes propositions nécessaires aux collectivités territoriales et notamment aux instances communales, intercommunales de la Plaine de Versailles et du Plateau des Alluets chargées, en particulier, de l’élaboration du ou des SCOT des territoires et de leur application. »

Cette association est organisée en trois collèges :

Ces collèges se réunissent indépendamment, afin de se connaître et faire des propositions. Les trois collèges sont représentés au sein du Conseil Patrimonial, qui prend les décisions. Sans moyens économiques, l’association a tout d’abord travaillé à définir le périmètre du territoire de la Plaine de Versailles avec les maires des 24 communes et à mieux connaître ce territoire au travers d’études (circuits courts, filière équestre, patrimoine historique, recensement des chemins…).

Elle a aussi organisé une journée annuelle où tous les adhérents pouvaient se retrouver ( dénommée « Plaine d’Avenir »). Elle a alors créé enfin un site internet. A la recherche de moyens financiers pour se doter de moyens d’animation (essentiels à la fonction de rencontres), l’APPVPA a été candidate à un pôle d’excellence rurale, sans succès, puis au programme LEADER, pour lequel elle a été retenue en 2009.

AVEC LE PROGRAMME LEADER, L’ASSOCIATION SE DOTE D’UNE STRATÉGIE, DE MOYENS D’ANIMATION ET DE FINANCEMENT D’ACTIONS

Les trois collèges ont contribué à la définition d’une stratégie : « La Plaine de Versailles : un territoire vivant porteur d’innovation ». Cette stratégie est déclinée en trois orientations majeures :

De 2009 à 2015, le programme LEADER a mobilisé 1 057 000 euros du FEADER (Fonds Européen pour l’Agriculture et le Développement Rural) au travers de divers projets déposés par les acteurs du territoire. Ces sommes ont été complétées par un montant équivalent d’aides françaises selon la règle de cofinancement 50/50.

Les projets qui ont bénéficié de ces aides ont trait aux trois orientations du programme, selon les besoins recensés en amont. Mais des projets nouveaux ont vu le jour au cours de ces 6 années, en lien avec la valorisation du patrimoine naturel : charte paysagère demandée par le collège des agriculteurs et signée par toutes les communes, suivi de la biodiversité agricole sur la Plaine …

Plusieurs communes bénéficient de ces financements pour mettre en valeur leur patrimoine rural :

  • Parcours pédagogique « L’eau au fil du temps » dans la commune de Beynes.
  • Etude sur la valorisation du patrimoine de la commune d’Orgeval,
  • Miscellanées à Fontenay le Fleury.
  • Exposition à Jumeauville.
  • Etude sur l’Allée Royale de Villepreux.
  • Parcours sur le site des Gondi dans la forêt domaniale de Bailly et Noisy.
  • Etude préalable à la restauration de la chapelle de Rennemoulin.
  • Réhabilitation de la gare du tacot à Feucherolles en tant que Maison de la Plaine.
  • Restauration du lavoir de Crespières.

L’APPVPA a lancé des actions de communication grâce à la volonté de quelques élus et bénévoles : brochure « Notre Territoire », éditée en 25 000 exemplaires pour faire connaître l’identité du territoire aux habitants ; Café-sciences sur des thèmes en lien avec l’agriculture et l’alimentation. La journée Plaine d’Avenir est remplacée par une série de manifestations au travers du « Printemps de la Plaine » suivi de « l’Automne de la Plaine ». Une réflexion est lancée avec d’autres partenaires sur l’avenir du site d’AGROPARISTECH à Grignon, destiné à être vendu dans la perspective du déménagement de l’école sur le plateau de Saclay.

Les agriculteurs ont réalisé des projets innovants de diversification : farine de la Plaine, valorisation de l’huile de colza en tant que combustible, lombricompostage de fumier de cheval, ouverture de boutique de produits fermiers, transformation à la ferme, gîtes équestre… Les agriculteurs ont aussi formé des groupes de travail sur plusieurs sujets : le développement des services aux communes, le réseau des producteurs de vente directe, la valorisation du fumier de cheval, les chemins de randonnée sur le site classé, la démarche ISO14001, etc. La carte des producteurs qui font de la vente directe ou de l’accueil a été réactualisée.

Une vaste étude a été lancée sur le thème de l’écologie territoriale, à savoir: mesurer les flux d’eau, d’énergie, de biomasse sur le territoire, en vue de mieux les utiliser localement. Cette étude de « métabolisme territorial » a été suivie d’études opérationnelles de valorisation d’énergie fatale (ex. chaleur des eaux grises en sortie de station d’épuration) et de biomasse (paille et bois pour des petites chaudières mixtes).

De nouveaux partenariats sont mis en place avec les établissements d’enseignement ou de recherche environnants sur des projets structurants et innovants : Master Tourisme et Environnement de l’UVSQY, programme ISARD (Intensification des Systèmes Agricoles par le Recyclage des Déchets) de l’INRA, synthèse des études paysagères sur la Plaine de Versailles avec l’ENSP (en préalable au SCOT et à la charte paysagère), programme Biodiversité Agricole avec la Ferme Expérimentale de Grignon.

Depuis 2011, la DRIEE, en charge de la gestion du site classé, confie le suivi de la programmation et l’animation du site à l’APPVPA. Le comité de pilotage se réunit tous les 2 ans en séance publique au Château sous la présidence du préfet et en présence des maires des villes concernées dont Versailles et de la présidente de l’Etablissement Public du château. C’est la reconnaissance d’un savoir-faire en matière d’animation et de promotion.

Enfin des échanges européens ont été organisés avec la Belgique et la Hollande sur le « marketing territorial » et avec la Suède et la Suisse sur « l’écologie territoriale ». Ces échanges sont obligatoires dans le cadre de LEADER et contribuent à créer l’Europe par les réseaux.

ET DEMAIN ?

La Plaine de Versailles est l’enjeu de convoitises et de projets de plus en plus nombreux et sectorisés.

La candidature de l’association à un second programme LEADER 2014-2020 n’a pas été retenue, pour laisser la place à de nouveaux territoires candidats en Île de France. Cette candidature avait été l’occasion de faire le bilan des six années passées et de définir une nouvelle stratégie orientée sur des innovations collectives : « Créer ensemble de la valeur ajoutée autour de la gestion du Vivant ». Cette valeur été déclinée sur les trois piliers Economique, Environnemental et Social. L’Association a du définir des priorités pour continuer à accompagner des projets, malgré des ressources financières moindres.

La Plaine de Versailles est aujourd’hui enserrée entre les deux Opérations d’Intérêt National de Sacaly et Seine Aval. Elle risque ainsi de subir une pression de plus en plus forte sur ses espaces agricoles. Plusieurs communes du plateau du Mantois ont rejoint l’association pour cette raison et pour y défendre un développement rural.

Le territoire est l’enjeu de convoitises de plus en plus nombreuses et diversifiées.Tour à tour espace « poubelle », réserve foncière, zone de spéculations foncières, cet espace fait aussi l’objet d’enjeux environnementaux ou touristiques qui ont le même effet de menacer l’activité agricole (aires d’alimentation de captage, renaturation du ru de Gally, centre d’entraînment du PSG, golf et autres équipements sportifs…). Tant que les projets seront sectoriels, ils omettront d’observer que la qualité globale de cet espace naturel et historique repose sur le maintien des agriculteurs.

C’est pourquoi, tout projet doit être discuté à l’aune de cette nécessité et en concertation avec les agriculteurs. Tout projet doit aider les agriculteurs à évoluer pour répondre aux nombreux enjeux des territoires agriurbains. Un lieu de rencontre entre les divers acteurs de la Plaine est plus que jamais nécessaire pour conserver une vision globale et transversale, qui fait défaut dans les politiques sectorielles.

Aujourd’hui 5 intercommunalités découpent la Plaine car ces dernières ont été conçues autour de villes-centres. En dehors de la communauté de communes de Gally-Mauldre, les communes adhérentes à l’association sont rattachées à des intercommunalités périphériques. L’Association Patrimoniale de la Plaine de Versailles reste donc le lieu de rencontre et de propositions d’actions pour gérer cet espace ouvert, naturel, agricole et à l’histoire riche.

C’est un défi que de proposer une gestion homogène de cet espace agricole et naturel, facteur de nombreuses aménités et d’une identité rurale et historique. Un dialogue est à ouvrir avec l’ensemble des intercommunalités, en vue d’actualiser la gouvernance de l’association. Grâce à ses trois collèges, l’association peut proposer des actions ou des projets réalistes et pertinents à l’échelle de la Plaine. Elle peut aussi aider les intercommunalités dans leur politique rurale, ou de lien urbain-rural. La demande croissante d’une alimentation de proximité demande par exemple une coordination à grande échelle .

La fonction de facilitation de l’associationa été reconnue par la DRIEE, qui la soutient financièrement et lui confie une mission d’animation sur le site classé. L’association est aussi reconnue par le Conseil régional en tant que « territoire agri-urbain » mettant en oeuvre une stratégie de développement propre et elle bénéficie à ce titre de financements de la Région et de l’Europe. Elle est aussi reconnue par le Conseil départemental des Yvelines dans la cadre de sa politique « tourisme » ou « environnement ». En quelques années, le territoire est désormais reconnu et identifié par ses élus, ses agriculteurs et ses habitants. Grâce à ces soutiens, l’Association Patrimoniale de la Plaine de Versailles et du Plateau des Alluets poursuit l’animation de projets élaborés par les acteurs locaux (ex. développement d’une agriculture durable et d’une alimentation de proximité, développement du tourisme agricole, trames vertes, aménagement des lisières agri-urbaines, plateforme collaborative numérique du développement durable de la Plaine, nombreux évènements et expositions, etc). L’implication et la coordination des intercommunalités deviendra néanmoins une nécessité et constitue la prochaine étape à franchir pour l’avenir de ce territoire d’exception.